La cour criminelle de Loire-Atlantique a retenu la confusion de peines totale de Gabriel Loison, déjà condamné à quinze ans de réclusion criminelle pour des viols et des abus de confiance, en 2017. Elle a reconnu cinq victimes, un homme et quatre femmes.
« Vous avez conscience que pour le commun des mortels, tout cela peut paraître délirant ? » Jeudi 2 juin, avant l’heure des plaidoiries et des réquisitions, les questions de la présidente Laurence Delhaye s’enchaînent dans l’espoir d’échapper à une énième digression de l’accusé sur ses théories inspirées de peuples amérindiens, africains ou de la civilisation maya, des « lois de la nature », sur sa conception d’un monde parallèle que seuls ses « initiés » peuvent concevoir.
À 82 ans, Gabriel Loison, fondateur de l’Université de la relation au Costa Rica, mouvement décrit comme sectaire, reste « convaincu du bien-fondé de sa démarche. C’est plus que de la croyance : il en a la certitude. Il ne joue pas, ne fait pas semblant. C’est quelque chose qui s’est construit toute sa vie », a affirmé, la veille, un expert psychologue.
Les faits de viols, les coups, abus de faiblesse et escroqueries, tels que décrits par les quatre parties civiles et d’autres anciens adeptes, ne sont qu’« inventions », aux yeux de celui qui se dit « chaman » plutôt que « gourou ». « Une énorme montagne de mensonges, en m’accusant, bien entendu ! », s’agace-t-il.
« Une illusion de la réalité »
Au terme de son délibéré, la cour a reconnu les cinq victimes, un homme et quatre femmes, dont une ne s’est jamais manifestée depuis sa plainte et son audition. « Pas des personnes fragiles, dans le sens d’une déficience. Pas des simples d’esprit », pointe Brett Le Meur, avocat d’une ex-auxiliaire de vie de 69 ans. « Elle s’est sentie actrice dans un mauvais film, dont le réalisateur, Gabriel Loison, a créé une illusion de la réalité, un univers magique, féerique, dans un endroit exotique. »
La séduction, la déconstruction du mental et du réel, avant une reconstruction, une naissance, possible grâce à des stages de 21 et 72 jours en Espagne, au Maroc ou au Costa Rica. « Il a maîtrisé tous les tenants et les aboutissants pour mettre en œuvre sa doctrine », selon Olivier Bonhomme, avocat général. Un processus long, vers « un embrigadement progressif ».
Pour Sophie Michaux, « Gabriel Loison a cette particularité de cueillir les gens dans leurs passions ». En apportant des réponses à des questions existentielles, en fournissant « un monde dans lequel tout est logique, tout a une explication », à l’aide d’« une novlangue », plaide une autre avocate, Célia Chauffray.
La défense a plaidé l’acquittement ou une confusion de peines. La cour criminelle de Loire-Atlantique a retenu cette dernière. Gabriel Loison a été condamné à quinze ans de réclusion criminelle pour des viols sur personnes vulnérables et des abus de confiance aggravés avec emprise. La même peine à laquelle l’ex-gourou a été condamné, en 2017, devant la cour d’assises d’appel de Rennes. L’accusé devrait sortir de prison en décembre 2023.